Information
le mardi 12 avril 2022 à 18h15
Centre culturel de Saint-Pierre
Le CONFÉRENCIER :
Daniel LAURET
- a enseigné la didactique du français à l’École Normale puis à l’IUFM de 1976 à 2004. Il a travaillé sur le créole à l’école : Thèse soutenue Aix-en-Provence en 1985.
- a dirigé la préparation des étudiants à l’épreuve facultative de créole au CRPE, de 1982 à 1997
- consacre désormais la majeure partie de son temps à l’écriture : Monsieur Oscar chez Ibis Rouge, 2004 ; Bob, Freedo-roman, chez Azalées, 2006 ; et aux Éditions Orphie : Raideur, 2011 ; Des Nouvelles de la Chaloupe, 2014 ; Couillonnades, 2015 ; Féminitude, 2019.
La CONFÉRENCE :
L’aimable sollicitation des Amis de l’Université me donne l’occasion d’une rétrospective sur la question créole. « La méthode, écrit Edgar Morin, c’est le chemin parcouru ». Dans ma thèse soutenue à Aix-en-Provence en 1985[i] et éditée à Saint-Denis en 1991[ii], était envisagée, dans le sillage d’Axel Gauvin, l’avènement d’un « bilinguisme additif » créole / français, d’un Réunionnais réconcilié avec sa langue et sa culture.
Qu’en est-il en 2022 ?
Kréol lé an lèr ! On peut considérer que nous avons progressé (reconnaissance / valorisation de la langue et la culture) mais si le créole fait 3 pas, pendant que la domination symbolique et économique du français en fait 10, paradoxalement, l’écart se creuse.
Par ailleurs, la physique des plaques tectoniques nous apprend que les continents ne sont pas immobiles. C’est encore plus vrai des langues et des cultures qui évoluent avec les sociétés qui les portent. D’un point de vue linguistique, le créole, satellite du français central, se risque de plus en plus dans des espaces de communication habituellement réservés au français et dont il était écarté jusque-là. Il subit de ce fait une forte « attraction » qui le modifie en profondeur. La continuité linguistique, la contigüité du français et du créole, ont généré une pratique langagière qui emprunte aux deux langues. « Entre-deux » ou « pas de deux », nous observons que le créole réunionnais se transforme ti pa, ti pa, en fréol.
“Comment Ti Jean i tromp la Mort ? Ce conte dit comment le héros parvient à faire reculer l’échéance fatale. Quelle ruse, quelle « part de colibri » pourrait être la nôtre ? Sur quel « effet papillon » pouvons-nous désormais miser pour empêcher que « les langues de France les moins répandues » ne continuent à s’étioler ?
« Un rabbin courait par les rues en criant : J’ai des réponses ! J’ai des réponses… Qui a une question ? »
Le conte rapporté par Alexandro Jodorowsky enseigne que poser des questions est la seule façon d’avancer dans l’étude. Quoiqu’il en soit, les réponses ne m’appartiennent pas. Elles sont collectives et ne peuvent émerger que d’une analyse lucide de la situation.
Ce que je m’efforce de faire, 35 ans après, pour partager avec le public, les bonnes (?) questions.